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Comment adapter l’école aux enfants à haut potentiel ?

On dit souvent que les enfants précoces ou à haut potentiel ont des problèmes à l’école. Certains décrochent, d’autres manquent simplement de motivation ; alors que peut-on faire pour les accompagner dans leur scolarité ? Qu’est-ce que les écoles et le système scolaire pourraient mettre en oeuvre pour s’adapter à leurs besoins ?

Enfants heureux à l'école

Les élèves surdoués ont besoin d’être stimulés. Certains posent beaucoup de questions au risque d’être considérés comme des éléments perturbateurs en classe. D’autres essaient de se retenir, mais ils en sont malheureux. Tout le défi pour une école est de répondre à leurs attentes. Et cela commence par cerner leurs passions et leur fonctionnement.

Les élèves les plus délicats à identifier sont ceux dont le trouble masque la précocité. S’il ne sont identifiés que par leur trouble, ils ne bénéficieront généralement pas de la stimulation nécessaire pour exprimer leur potentiel réel. Ce qui mène souvent, malheureusement, à la démotivation totale de l’enfant voire à l’échec scolaire.

Certaines écoles commencent à mettre en place des parcours particuliers ou aménagés. Parmi les différentes approches, on trouve la concentration des apprentissages sur six mois plutôt qu’un an, ou encore la possibilité pour l’élève de travailler sur un projet personnel pendant les heures de cours du moment que la notion est acquise. C’est notamment le cas d’une école québécoise, le collège François de Laval, dont parlait il y a quelques jours l’émission « C’est encore mieux l’après-midi » sur Radio-Canada que je vous propose de découvrir dès à présent en retranscription ci-dessous.


Depuis septembre dernier, les élèves surdoués peuvent suivre un parcours adapté au collège François de Laval. Lorsqu’ils maîtrisent la matière, les participants peuvent être exemptés de certains cours pour se consacrer à des projets personnels. Pour en parler nous avons Marc Dallaire, directeur général du collège François de Laval. Alors d’où est venue l’idée d’intégrer davantage et encore mieux les élèves à haut potentiel ?

Marc Dallaire – Depuis quelques années, à chaque rentrée scolaire, on entend parler des élèves à haut potentiel qui ne trouvent pas vraiment leur place dans le système actuel. On avait chez nous un jeune, avant même la mise en place du parcours, qui avait reçu un diagnostic de haut potentiel. Sa mère nous avait invités à un colloque sur ce sujet. La directrice des services pédagogiques s’y est rendue et est revenue avec beaucoup d’idées, en se disant « On peut faire quelque chose pour ces élèves-là ». Et c’est ce qu’on a travaillé pendant un an et demi, avant d’arriver au résultat qu’on a actuellement.

Alors comment fonctionne ce nouveau parcours ? Au quotidien, qu’est-ce que cela veut dire pour ces élèves ?

Marc Dallaire – D’abord je voudrais préciser un point. En ce qui concerne les personnes à haut potentiel, ou douées selon les préférences, on a tendance à penser qu’elles n’ont aucune problématique au niveau scolaire. Mais on retrouve parfois chez ces jeunes d’autres difficultés qui vont masquer la douance. Dans d’autres cas c’est un manque de motivation. Ce que les parents recherchent, c’est d’abord de la souplesse, de la flexibilité dans la grille horaire ; par la suite, il faut que nous soyons capables de les motiver suivant différentes stratégies et de leur permettre de travailler sur leurs projets.

Alors grosso-modo ils suivent le même parcours scolaire, mais qu’est-ce qu’on leur propose lorsque ça va bien, que la matière est maîtrisée ? Qu’est-ce qu’ils peuvent faire pendant les heures de classe ?

Marc Dallaire – D’abord on rencontre les parents, qui doivent nous fournir un diagnostic. Ensuite l’enfant à haut potentiel nous propose un projet, selon ses motivations. Par exemple cette année en première secondaire, on a des élèves qui font une bande dessinée, un autre qui écrit un roman, des élèves qui travaillent en créant des jeux sur ordinateur…

Donc ce sont des projets qui peuvent aller dans tous les sens !

Marc Dallaire – C’est ça. Ça peut rendre service, aider à découvrir une passion. Ça peut être un projet sur une année, ou un avant Noël et un après, semestriel, selon la formule choisie.

Et comment fait-on pour les identifier, ces élèves surdoués ? Vous parlez d’une évaluation avec un neuropsychologue. Est-ce la seule condition pour bénéficier du programme ?

Marc Dallaire – Tout à fait. Comme je le disais tout à l’heure, certains de ces enfants auront besoin de l’orthopédagogue. On a cent cinquante plans d’intervention chez nous, avec des professionnels en mesure de les aider. Certains ont aussi des difficultés sociales, comme d’autres ont des déficits d’attention ou des troubles dys ; il est important de les accompagner. D’autres fonctionnent tout à fait normalement, et lorsqu’on atteint un niveau de motivation plus difficile, on rencontre les parents pour discuter de la mise en place éventuelle du programme spécial. Parce que pour un élève de première secondaire, rester en classe quatre périodes pour apprendre les fractions alors qu’on a compris au bout de la première est difficile à supporter, et le temps peut lui sembler long.

Alors parlons de la socialisation. L’entrée au secondaire c’est aussi une expérience de vie, c’est l’adolescence, les amis, les groupes, il y a beaucoup d’enjeux. Est-ce qu’il y a un danger dans le fait de les mettre à part parce qu’ils sont surdoués ? Comment s’assurer qu’ils soient bien intégrés dans la vie étudiante sans être nécessairement marqués ou montrés du doigt « Voici la cohorte d’élèves surdoués » ?

Marc Dallaire – C’est un vrai défi. C’est tout nouveau dans le collège, et il y aura sûrement des ajustements à faire. Il faut y aller avec de la sensibilisation auprès des autres. J’ai une jeune fille en quatrième secondaire qui est dyslexique. De temps en temps, elle sort de classe pour aller travailler avec l’orthopédagogue. Ce n’est pas différent en bout de ligne pour ces jeunes-là. On reçoit parfois des athlètes de haut niveau chez nous. J’en ai un qui a fait tout son parcours chez nous, qui sortait de classe voire manquait des cours pour aller s’entraîner. On s’arrangeait, et ces élèves-là n’étaient pas exclus pour autant du reste du groupe. Il faut sensibiliser à cette réalité-là. Le fait que nous ayons rendu public notre programme cette année permet aux jeunes de réaliser qu’une partie de leurs camarades est à haut potentiel, et que ceux-ci ont besoin de ce type de projet pour rester motivés et demeurer à l’école. Parce qu’il se trouve aussi parmi ces jeunes-là des élèves décrocheurs. Notamment quand ils ne sont pas motivés à travailler.

Le programme a été lancé en septembre dernier, c’est donc difficile de de faire un bilan précis de la première année, mais est-ce que vous voyez déjà des modifications, des ajustements ? Et surtout est-ce que vous songez à accueillir davantage d’élèves surdoués ?

Marc Dallaire – Certainement. A chaque rentrée, lors des portes ouvertes, on invite les parents de jeunes à haut potentiel à venir nous voir pour que nous puissions leur expliquer le programme. Il y a aussi des ajustements à faire. On doit par exemple mettre l’accent sur la formation de notre personnel spécialisé. La fédération des établissements d’enseignement privé tenait un colloque il y a deux semaines sur les élèves à haut potentiel, nous avons invité notre personnel à s’y rendre. Nous en avons aussi fait auprès de nos enseignants afin qu’ils comprennent mieux la réalité de ces jeunes-là. Je pense qu’il faut vraiment investir dans la formation et éventuellement avoir plus de personnel enseignant dégagé pour coordonner le tout.


Retenons donc que les enfants précoces ont des besoins sur lesquels il faut s’interroger afin de mieux les comprendre, les accompagner et les soutenir à l’école comme en famille. Les besoins diffèrent selon chacun, mais tous doivent pouvoir se sentir bien en classe et ainsi s’épanouir. C’est en l’occurrence le message que nous avons voulu faire passer à travers les pages de notre plaquette d’information « Identifier et accompagner l’élève à haut potentiel intellectuel ».

Sur ces mots, je vous invite à retrouver l’émission en podcast sur le site de Radio-Canada à partager vos avis en commentaires !

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