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Un témoignage instructif sur la prise en charge inadéquate d’un jeune élève surdoué

Pablo est un enfant précoce incompris. Vu comme un élève perturbateur par ses enseignants, son haut potentiel a été reconnu mais les aménagements mis en place se sont révélés catastrophiques pour lui.

Le syndrome de l’imposteur chez l’enfant à haut potentiel souffrant de troubles Dys

Comment la mauvaise compréhension du haut potentiel peut-elle mener à des décisions éducatives blessantes ? Nous reprenons ici l’expérience malheureuse de Pablo, relatée dans le Républicain Lorrain, afin qu’elle puisse aider chacun à se poser les bonnes questions et à trouver des solutions efficaces et adaptées à la problématique du haut potentiel pour son enfant personnellement.

Un regard incomplet sur la personnalité de Pablo

Dans les cas de Pablo, identifié comme enfant à haut potentiel à 10 ans par le psychologue scolaire, il y a eu une volonté initiale de prise en charge, seulement la spécificité du surdouement de l’enfant n’a pas été prise en compte dans son intégralité.

Selon le témoignage recueilli par le journal, l’équipe éducative a orienté ses décisions en se basant uniquement sur les conséquences de son haut potentiel : une agitation manifeste

« L’enfant a bénéficié d’un emploi du temps aménagé prévoyant 2h par jour dans une autre classe que la sienne pour lui permettre de se poser, de ne plus être en confrontation directe avec ses camarades, tout en effectuant son travail de CM2 », nous précise-t-on. 

Or, si le fait de lui permettre de se poser et souffler par moments peut sembler cohérent, en l’occurrence, la solution proposée à Pablo, élève de CM2, de marquer des temps de pause dans les classes de CP à CE2, a fait complètement abstraction des besoins liés au haut potentiel et de sa sensibilité :

« Pour moi, ça a été vraiment humiliant d’être à nouveau avec des petits à mon âge. Parce que vous savez que lorsqu’on arrive en maternelle, les CM2, ce sont des grands et on voudrait tout de suite être à leur place. Et comme j’y étais, revenir chez les petits n’a pas été facile. Ils me demandaient si c’est parce que j’étais un peu bête, un âne, quoi. »

L’erreur pour la prise en charge de Pablo a été de vouloir agir uniquement sur la face visible de l’iceberg, soit l’agitation et une certaine maladresse vis à vis de ses camarades et enseignants.

Bernard Blanchard, pédopyschiatre à Mercy et à la maison des adolescents, a réagi en ces termes à cette proposition indélicate :

Dans le cas de Pablo, que pensez-vous de la méthode utilisée ?

« Je ne la comprends pas, cette méthode. Ces jeunes sont habituellement « surclassés » et cela doit également prendre en compte la maturité affective du sujet. Mais l’inverse est effectivement vécu comme une véritable humiliation. »

https://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-ville/2019/07/02/je-ne-comprends-pas-bien-la-methode

De la même façon, Thierry Pigon, ancien directeur à l’école Saint-Eucaire à Metz, qui a eu en charge de enfants précoces, évoque l’incompréhension de l’équipe éducative :

Il faut accepter la différence. Rétrograder qui que ce soit ne peut pas être la solution. On voit bien dans le cas présent que nous sommes dans l’incompréhension individuelle.

https://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-agglo-et-orne/2019/07/02/on-ne-peut-pas-laisser-ces-enfants-les-bras-ballants

Des éléments de prise en charge qui ont échappé à l’équipe éducative

La réalité des besoins de l’enfant à haut potentiel, lorsqu’elle est masquée par un comportement perturbateur, ne doit pas être négligée :

Et en même temps, ce n’est pas facile, l’inclusion. L’enfant sait des choses, plein. Et pour un enseignant, apprendre régulièrement d’un enfant peut-être compliqué, surtout devant une classe complète. En famille, ça passe mieux ! Mais lorsqu’il commence à perturber la classe, c’est parce qu’il s’ennuie, on le sait. »

https://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-agglo-et-orne/2019/07/02/on-ne-peut-pas-laisser-ces-enfants-les-bras-ballants

Le fait de rétrograder Pablo dans les petites classes, en termes d’agitation, ne peut qu’accentuer son malaise et rendre encore plus difficile sa « cohabitation » avec ses camarades.

Il aurait mieux valu lui proposer des espaces de détente ou des moments d’approfondissement au sein de sa classe de CM2, dans le cadre de projets individuels de recherche par exemple, pour lui permettre de nourrir sa soif d’apprendre.

Nous anticipions d’une à deux années et on leur donnait à manger, comme on dit ! Ils ont faim tout le temps, ces enfants, on ne peut pas les laisser les bras ballants.

https://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-agglo-et-orne/2019/07/02/on-ne-peut-pas-laisser-ces-enfants-les-bras-ballants

Or pour Pablo tout le côté haut potentiel est passé à la trappe, malgré le fait d’avoir été identifié comme tel.

Ses besoins et sa personnalité toute entière n’ont pas été compris, avec à la clé une adaptation pédagogique qui se révèlera être tout le contraire de ce qu’il aurait fallu faire.

« Quand je suis intéressé par ce que dit la maîtresse, c’est-à-dire des choses que je ne connais pas, je suis sage mais dans le cas contraire, je m’ennuie très vite et c’est vrai que je peux être agité. J’ai bien eu de la lecture mais j’ai terminé vingt-deux livres en un mois. Et ça n’est pas facile de travailler quand les petits me regardent et me posent plein de questions sur ma présence.

Pablo l’a bien comprise lui, sa particularité, et exprime justement que dans son cas, l’ennui mène à l’agitation.

Encore faut-il qu’il soit entendu par les adultes qui l’entourent et que l’on prenne bien la mesure, pour tous ces enfants à haut potentiel, de l’impact que peut avoir un programme qui ne sollicite pas assez leur esprit et leur besoin de connaissances et d’apprentissages afin de ne pas confondre les causes et les conséquences.


Identifier et accompagner l'élève à haut potentiel intellectuel

Nous avons édité un guide à destination des enseignants pour aider ces derniers à mieux appréhender la réalité de l’élève à haut potentiel et à mettre en place des aménagements adaptés. Dans l’année qui vient, avec votre soutien, nous ferons tout notre possible pour qu’il soit diffusé le plus largement possible auprès d’un maximum d’établissements scolaires et d’enseignants.


Vous pouvez lire toute la couverture du Républicain lorrain sur le cas de Pablo à l’aide des liens suivants.

https://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-agglo-et-orne/2019/07/02/l-humiliation-vecue-par-un-enfant-a-haut-potentiel

https://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-ville/2019/07/02/je-ne-comprends-pas-bien-la-methode

https://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-agglo-et-orne/2019/07/02/on-ne-peut-pas-laisser-ces-enfants-les-bras-ballants

4 commentaires

  1. J’ai fait l’acquisition de votre brochure. La douance m’interroge et je me suis beaucoup documenté sur le sujet. Enseignante je souhaite pouvoir adapter un maximum mes pratiques pour accompagner mes élèves précoces et ce peu importe leur profil.

  2. Bonjour
    Ça fait beaucoup de bien de lire des mots qui me permette de comprendre mon fils et surtout de l’aider à réussir sa vie
    Malgré la complexité de la précocité j’apprends à chaque article qui est mon fils
    Je suis rassurée aussi de voir que son attitude et sa façon de considérer ou de compte les choses sont normales vu sa précocité

  3. Bonjour,

    Il y a beaucoup d’articles concernant les enfants « perturbateurs » dont la « sur douance » est vite recherchée, il s’agit généralement de garçons. C’est déjà bien, même s’il reste à comprendre comment les aider.

    Mais, par contre, pour ce qui concernent les enfants discrets, qui ne perturbent jamais la classe, quand « sur douance » il y a, elle reste massivement ignorée. Et ceci concerne massivement les filles.

    Il y a probablement un grand nombre de petites filles « sur douée », qui se sentant « différentes », se mettent « en « retrait », apparaissant ainsi aux yeux, et des enseignants, et des parents, comme des enfants « sans problème ».
    Ces enfants, dépensent une énergie importante à ce contraindre pour s’aligner sur le comportement « normal » : « ne pas se faire remarquer ». Ce à quoi elles deviennent expertes, dans la souffrance.
    L’ennui en classe est pour elles, en plus, également au rendez-vous, mais personne ne s’en aperçoit et elles sont généralement taxées par leur enseignant de :  » élève appliquée mais devant persévérer dans ses efforts  » !

    Pourquoi ne pas inciter à faire passer à tous les enfants un test de « QI » au moins une fois dans leur scolarité ?(par exemple en CM1). Ce pourrait être fait par la psychologue scolaire.
    Cela permettrait,de plus, de constituer des bases pour des études sur cette population, aider à comprendre et pouvoir mettre en oeuvre des enseignements plus adaptés. Un plus grand nombres d’enfants pourraient probablement être ainsi détectés.
    C’était d’ailleurs il y a quelques années systématiquement fait en fin de 3ème et terminal je crois. Ces tests étaient collectifs et il n’en résultait rien pour les enfants.
    Mais même « collectif » cela aurait le mérite d’attirer l’attention, au moins, sur les cas « suspecte ».
    Une étude plus personnalisée pourrait être alors conseillée aux parents.

  4. Nous avons nous aussi vécu des aménagements qui se sont révélés néfastes. Notre fils présente le profil de l’enfant précoce désinvesti et décrocheur. Ces aménagements (pleins de bonne volonté la aussi) ont bien failli le faire décrocher pour de bon si nous ne l’avions pas immédiatement changé d’école…

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