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Le témoignage riche d’enseignements d’un jeune garçon surdoué

Vincent a 9 ans et un QI de 130. Dans cet entretien, il nous livre son témoignage sur les difficultés qu’il a rencontrées du fait de sa différence, sur les solutions mises en place par ses parents et sur ses passions.

Vincent, enfant précoce

Vincent est un jeune garçon surdoué de 9 ans et demi. Son QI a été évalué à 130, un chiffre sensiblement supérieur à la norme. Avec une grande maturité, il nous raconte comment il vit sa différence et les conséquences qu’elle entraîne dans ses relations avec les autres. Ceux-ci, enfants de sa classe ou enseignants ont souvent du mal à le comprendre.

Vincent est passionné de philosophie et manie avec brio les concepts abstraits, il a cependant plus de mal à apprendre, par exemple, les tables de multiplication par cœur, comme le font pourtant ses camarades du même âge.

A travers le témoignage de Vincent nous retrouvons les problèmes que rencontrent bon  nombre de jeunes précoces pour qui le cadre scolaire traditionnel est loin d’être adapté. Malgré quelques approximations, cet entretien est riche d’enseignements et surtout, doit nous conduire à toujours prendre au sérieux les difficultés rencontrées par les enfants précoces. 

Lorsque j’étais plus petit, je me demandais ce qui faisait que j’étais différent, parce que je me sentais différent. C’était tout le temps des questions qui se posaient sur le monde ou souvent sur ma vie.

Tout petit tu  posais déjà des questions à ta maman sur le sens de la vie ?

Oui, beaucoup. Parfois même elle me disait « Bon arrête de poser des questions, on change de sujet » parce que je lui en posais tellement…

Ce qu’il faut savoir c’est que tu adores la philosophie.

Ce qui m’intéresse dans la philosophie, c’est le côté scientifique et, en même temps, un petit mélange d’imagination.

Par exemple ?

On dit souvent qu’on est des animaux à part égale avec les autres mais qu’on a continué à évoluer plus pour devenir l’espèce dominante de la chaîne alimentaire. Je ne trouve pas ça très scientifique mais plutôt philosophique parce que selon moi la science regroupe beaucoup de théories mais la plupart des théories, c’est souvent de la philosophie.

Donc, tout petit, tu avais déjà ces questions là dans la tête et tes parents ont décidé de te faire passer un test pour contrôler ton coefficient intellectuel, ton QI comme on dit.

Oui, 130.

Alors que la moyenne est autour de 90 ?

Oui.

Qu’est-ce que tu as ressenti le jour où tu as appris que tu avais un QI de 130 ?

Je me suis dit « Ouh là, qu’est-ce qu’il se passe ? Est-ce que je suis normal ou suis-je spécial ?  Mais en fait, au début, je pensais que j’étais super fort et je ne savais pas que ça allait m’apporter beaucoup de problèmes de savoir que j’étais comme ça.

J’imagine que tu devais te sentir très différent de tes copains en cours de récréation ?

Exactement, oui. J’ai été rejeté. Ils ne comprenaient pas donc du coup ils me prenaient pour un idiot, ils me prenaient pour un handicapé. Ils me disaient « Faudrait vraiment que tu ailles dans un hôpital psychiatrique ou des choses comme ça. Donc au début je me suis senti vraiment très seul parce que personne ne me comprenait. Par exemple, j’avais tellement peur dans la cour que j’avais hâte de rentrer en classe parce que c’était le seul endroit où je me sentais en sécurité.

On dit que les enfants précoces sont des hypersensibles. Il faut dire que l’école, un moment, était un enfer pour toi, tu étais très malheureux.

Oui, je suis vraiment très sensible à ce qui peut se rattacher aux insultes. « Eh t’es idiot, tu ressemble à Lucy l’australopithèque ! » En fait, eux ça passe comme ça, en deux secondes ils l’oublient, mais moi ça reste. Pour moi c’est du martyr mais pour les autres c’est de la rigolade. Je ne comprends pas. Du coup, à la fin, lorsque je revenais de l’école, j’ai éclaté en sanglots et je n’en pouvais plus.

Tu as fait ce qu’on appelle une dépression.

Exact ! Je n’étais plus le même en fait. J’avais beaucoup changé à ce moment là et je commençais à m’auto-déconstruire.

Tu as tout fait pour te faire intégrer par tes copains ?

Ah oui, oui, oui, là j’ai vraiment tout essayé. Il y a un moment je commençais même à devenir violent avec tout le monde. Mais en fait je me suis rendu compte que ça ne donnait rien donc j’ai abandonné.

Est-ce qu’en tout cas les professeurs, les instituteurs que tu as croisés t’ont aidé ?

Euh… Souvent, mais non… A un moment ça n’a vraiment pas été bien. C’était à Strasbourg que ça s’est passé. Ça a largement dégénéré parce que je parlais en classe, je prenais une règle, je l’attachais à un stylo et je faisais comme un avion. A un moment on a commencé à me serrer le bras, je revenais j’avais des marques rouges.

Qui donc ?

Des professeurs à Strasbourg. Ils n’en pouvaient plus de moi, ils ne savaient pas quoi faire et ils commençaient à aller au-delà de la violence verbale. Ils me faisaient aussi des violences physiques.

Ils te faisaient mal au bras pour te faire taire ?

Oui.

Ce qu’il faut dire, c’est que tu es très abstrait dans ta tête, que tu comprends tout très vite mais qu’il y a des choses qui sont compliquées pour toi. Par exemple, les tables de multiplication ce n’est pas quelque chose de simple ?

Non, je n’ai jamais réussi à les apprendre mais par contre j’ai toujours réussi à me trouver des techniques pour arriver à multiplier et à soustraire. Les apprendre pour qu’elles restent scotchées dans ma tête c’est impossible.

C’est très compliqué de se dire « Je suis surdoué » et puis, à la fois, quelque fois on me prend pour un imbécile ?

Oui, beaucoup. Je me suis posé beaucoup beaucoup de questions là-dessus avant de me rendre compte qu’en fait je ne suis ni plus intelligent ni plus idiot. Je me suis rendu compte que j’étais juste différent. Ça a pris vraiment longtemps mais j’ai fini par m’en rendre compte.

Ce qu’on ne sait pas c’est que l’enfant précoce, très souvent, est en échec scolaire.

Et oui, mais pourtant tout le monde dit « T’as un QI de 130, normalement tu devrais réussir comme Einstein. et même d’ailleurs Einstein a eu beaucoup de problèmes pour réussir. On le traitait même de cancre.

Qu’elle a été la solution alors pour te faire sortir de l’enfer de l’école ?

Il y avait plusieurs choix mais, selon moi, le meilleur, celui qu’on a fait, c’est de me déscolariser et de me mettre à l’école à la maison.

Ce que tu fais tous les matins avec ta maman.

Exactement !

Et alors ?

Et alors là, présentement, ça va beaucoup mieux, je suis en train de bien me reconstruire et ce que je tiens vraiment à dire c’est qu’avec les enfants précoces, même s’ils sont dans la dépression, il ne faut pas abandonner, ça va toujours marcher.

Ce qui est fascinant, c’est que tu es un tout petit bonhomme mais que tu te poses déjà de grandes questions métaphysiques.

Oui, ça tout le monde me le dit. Tu parles comme un adulte, tu dessines comme un adulte, tu fais plein de choses comme un adulte. Moi ça me rend fier mais par contre, lorsque je suis dans des matières que je ne comprends pas, on me dit « T’es nul, espèce d’idiot ! »

Et plus tard, quel métier aimerais-tu faire ?

Médecin chercheur contre le cancer du cerveau.

Tu veux savoir comment ça marche dans ta tête ?

Le cerveau c’est quelque chose de très complexe où il passe beaucoup de neurones et beaucoup d’informations et ça m’intéresse vraiment beaucoup d’essayer de trouver une solution contre ça.

Tu sais qu’on dit des enfants précoces comme toi qu’ils font plus travailler l’hémisphère droit que l’hémisphère gauche, tu le sais ça ?

Oui. En fait, si on veut travailler dans quelque chose qu’on aime, nos deux sphères cognitives vont entrer en contact et vont créer des ponts qui les connectent pour arriver à parler entre elles pour me faire réussir dans ce que j’aime faire parce que je prends du plaisir à le faire.

Tu es un petit garçon rempli de passions.

Oui, comme par exemple l’origami, le dessin, la philosophie, la mythologie, l’histoire, la peinture, la sculpture. Ma sculpture préférée est la Vénus de Milo.

Pourquoi ?

Parce que je trouve que, puisqu’il lui manque les deux bras, ce serait sympa de s’imaginer ce que ça donnerait si on lui ajoutait des bras.

Tu les vois comment ses bras ?

Moi je la vois avec une pomme d’un côté et un miroir de l’autre.

Pour se regarder ? Tu la sens un peu narcissique ?

Oui un peu.

On dit aussi souvent que les enfants précoces sont suractifs, qu’ils dorment assez peu. Tu dors beaucoup toi ?

Parfois, lorsque je me couche, ça prend une ou deux heures avant que j’arrive à m’endormir.

Tu gamberges trop ?

En fait, c’est que je réfléchis trop. Je me pose trop de questions donc…

Ce sont toujours les mêmes questions ou…

Non, non, même jamais en fait. Je me pose beaucoup de questions différentes. Selon moi, l’être humain est fait pour se poser des questions.

Tu sais qu’il y en a qui ne s’en posent pas trop de questions ? Peut-être pas assez.

Oui, c’est ce qui fait que parfois on gâche sa vie parce qu’on ne se pose pas assez de questions selon moi.

Et tu regardes l’actualité, ça t’intéresse ?

J’adore ça.

Et là aussi tu te poses des questions ?

Oui, beaucoup.

Qu’est-ce qui t’interpelle ?

Je me dis « Mais pourquoi est-ce qu’il y a la guerre en Syrie, pourquoi il a des meurtres, pourquoi est-ce que François Hollande ne permet pas telle loi ? » ou des choses comme ça.

Pourquoi as-tu décidé de témoigner ce soir ?

J’ai décidé de témoigner pour aider des personnes. Pour leur dire qu’il y a toujours un moyen d’aller vers le haut selon moi. Il y a comme une courbe de la vie qui monte vers le bien, le mal. En fait, juste leur dire qu’il y a tout le temps un moyen de remonter vers le haut.


Vincent est également l’auteur avec sa maman de Tronche de zèbre, ma vie d’enfant précoce.

« Quand ma mère a découvert que j’étais zèbre, elle a pleuré »… de joie peut-être et de crainte aussi car elle savait ce que représentait la vie d’un enfant à « haut potentiel intellectuel » (HPI).
Vincent est aujourd’hui un pré-adolescent, heureux, joyeux, plein d’humour et surtout épanoui.
Mais à l’âge de huit ans, il s’est senti inutile. Trop de pression, trop de mal être, trop de maltraitance à l’école, accompagné d’une perte lente, lourde et sourde de son estime de lui.
Il se sentait submergé.
Dans ce livre, il raconte avec ses mots, sa sensibilité exacerbée, son hyperémotivité, son parcours chaotique avant qu’il ne comprenne ce qui se passait en lui.
Mais avant tout, Vincent a écrit ce livre pour aider les enfants « comme lui », à surmonter les pièges et les embûches liés à cette particularité, celle de ces enfants qui réfléchissent autrement.

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2 commentaires

  1. Merci beaucoup Vincent pour ce témoignage ! Enzo 7ans et demi – 120 de QI – se reconnaît dans ce témoignage – même si les maths sont son domaine préféré. 😉 En voyant le témoignage, Enzo a dit qu’il aimerait bien parler avec Vincent pour échanger. C’est peut-être ce qu’il lui manque le plus : des moments pour échanger entre petits zèbres…

    1. Bonjour
      En tant que parent d’un enfant « zèbre »! Je retrouve cette similitude avec mon fils; à travers le récit de Vincent…
      Bien des fois, je suis dépassée moi-même par le comportement de mon enfant; car, chaque jour, que ce soit pour ses activité à l extérieur ou bien à l’école , il y a des reproches à son égard….
      Si vous avez pris le temps de lire le témoignage de Vincent, sachez qu’avec mon fils qui a 9 ans, ce n’est pas facile tous les jours….
      Je souhaite un bon courage aux parents et restons à l’écoute afin que nous menions à bien avec l’aide des professionnels la continuité du travail que nous devions aussi accomplir avec nos enfants…

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